Le départ de TOTAL a donné lieu à toute une série d’articles dans les journaux locaux vantant « le redéploiement en marche » de la zone industrielle.
Lacq : ce fut « une formidable aventure » nous diront quelques anciens salariés interrogés.
Peu de personnes connaissaient les résultantes d’une telle activité, et si l’on savait on se taisait.
La seule et unique enquête épidémiologique remonte aux années 1970 et personne ne se souvient vraiment de ses conclusions.
L’implication des syndicats sur ces questions a longtemps été timide. Avec la longue grève de Péchiney de l’été 1973, le problème est posé. Les ouvriers n’en pouvaient plus de subir le fluor, la chaleur, la poussière, l’amiante, le champ électromagnétique.
Nombreux sont ceux qui s’interrogent : « les copains sont malades ». Les questions subsistent, chuchotées, presque honteusement posées, 40 ans après.
On nous parle de revitalisation du Bassin de Lacq, avec son lot de création d’emplois. 50 emplois seraient ainsi créés par TORAY avec la mise en service en 2014 de sa nouvelle unité de production de PAN ou PolyAcryloNitrile, base des fibres de carbone, produit à partir d’acrylonitrile, un CMR [1] hautement toxique.
On oublie de dire que les salaires seront peu élevés et que l’on fera appel à la sous-traitance.
On oublie de dire que 400 emplois ont disparu en 2 ans.
On oublie de dire que nombre de productions utilisent des substances et matériaux dangereux dont on ignore encore, pour certains d’entre eux, les répercussions sur l’homme et sur l’environnement (c’est le cas des nanotubes de carbone fabriqués par ARKEMA à Mont).
Le principe de précaution est un principe dont on ne veut pas entendre parler.
Les services de l’État sont là pour surveiller le bon fonctionnement des entreprises et l’application des règles environnementales. Lorsque l’on connait la façon dont l’épineux dossier du CCl4 a été géré par la DREAL (voir ci-dessus), nous ne pouvons que nous interroger sur l’impartialité de ces services.
La priorité est trop souvent donnée aux considérations industrielles et économiques. La question environnementale reste secondaire. Comment pourrait-il en être autrement lorsque la protection de l’environnement se fait en fonction d’un ratio coûts-avantages qui convient à l’exploitant ? Ainsi, lorsque des multinationales comme TOTAL ou ARKEMA jugent que face à un problème de pollution les solutions envisagées sont trop onéreuses, elles ont la possibilité de ne pas les retenir.
Nous sommes en droit de connaître à la fois les conditions de travail à l’intérieur des entreprises, la gestion de celles-ci, mais également les conséquences de la manipulation des produits et en particulier des CMR sur la santé des employés, des intérimaires et sur la population.
Nous sommes en droit de demander que la dépollution des sites industriels se fasse réellement et pas avec les deniers publics.
Nous sommes en droit de demander des industries propres. Elles existent, des moyens peuvent être mis en place pour permettre leur installation.
S’interroger sur le problème de l’acceptation des dangers dans le domaine industriel est une question qui doit être débattue par tous et pas uniquement par « ceux qui savent ».
Les cadres de l’administration et de l’industrie fuient leurs responsabilités en se cachant derrière protocoles et normes.
Il est temps de cesser de tenter de nous infantiliser en nous rassurant à bon compte mais au contraire de faire confiance en l’esprit de responsabilité de chacun pour construire collectivement l’avenir de notre territoire.
* Adieu pauvre pauvre. Chanson satirique béarnaise interprétée pour la fin de Carnaval. Comme souvent en Béarn les paroles ont un double sens.